Comment bien transmettre sa maison à ses enfants ?

Une question qui est souvent posée est comment bien transmettre sa maison, au moment de son décès, que ce soit à ses enfants, son époux/épouse ou encore un partenaire enregistré. Penser alors à la transmission de ses biens est souvent émotionnellement difficile car cela concerne un évènement autant redouté qu’inévitable pour tout un chacun. C’est pourquoi le traitement de cette question est souvent négligé et repoussé aux calendes grecques. Pourtant, il s’agit d’un sujet à ne pas négliger car si la loi a certes prévu des mécanismes à défaut de dispositions prises, ces mécanismes ne correspondent pas toujours aux souhaits du propriétaire et/ou peuvent coûter.

Mais alors, comment faire pour que notre bien soit transféré à ceux que nous avons choisis et sans que cela n’en devienne un cadeau empoisonné pour eux ?

Pour le savoir, nous sommes allés interviewer notre spécialiste dans le domaine, Maître Hélène Ecoutin-Dupuy, de l’étude NVLE à Neuchâtel.

Voici notre échange avec Maître Hélène Ecoutin-Dupuy:

Maître Ecoutin-Dupuy, bien transmettre son bien à son décès, est-ce que c’est quelque chose de facile aujourd’hui ?

Il faut déjà s’entendre sur ce que vous entendez derrière ce terme « bien » : cela peut signifier une transmission conforme aux souhaits du propriétaire ou peut encore signifier une transmission la plus économique possible ?…

 

Abordons alors cette première facette, celle de pouvoir disposer librement de ses biens, pouvoir choisir à qui ils reviendront.

Il y a une bonne nouvelle puisque les personnes qui veulent planifier leur succession disposent de davantage de liberté avec la réforme du droit des successions qui est entrée en vigueur le 1er janvier 2023.

Le législateur, à cette occasion, a notamment réduit certaines réserves héréditaires, et a même supprimé celle des parents. La réserve du conjoint survivant peut également disparaître à l’ouverture d’une procédure de divorce, à certaines conditions.

Ainsi, les testateurs disposent librement d’une plus grande part de leurs biens, ce qui est plus en phase avec le monde actuel. Par exemple, les enfants qui héritent aujourd’hui de leurs parents sont bien souvent des adultes installés, financièrement totalement autonomes, qui ont eux-mêmes des enfants qui eux par contre démarrent dans la vie active (par exemple avec un premier achat immobilier) et pour lesquels un soutien financier grâce à un héritage a plus de sens. Avec cette réforme, une personne peut donner moins à ses enfants, au profit, par exemple mais ce n’est qu’une possibilité, de ses petits-enfants.

Attention toutefois, pour bénéficier de cette plus grande liberté de disposer, il est nécessaire de prendre des dispositions à cause de mort. A défaut, le législateur a prévu et déterminé ce que les proches du défunt devront recevoir ou ne pas recevoir. Ainsi et sans planification, le conjoint survivant en procédure de divorce par exemple demeure un héritier légal qui recevra une part dans la succession, nonobstant la procédure en cours et peut-être même l’absence de tout lien notamment financier entre les époux.

 

Est-ce que transmettre ses biens coûte quelque chose aux héritiers ou reçoivent-ils l’entier de l’actif sans aucun prélèvement ?

D’abord les héritiers recevront l’actif net de la succession.

C’est-à-dire que les héritiers qui acceptent une succession en reçoivent l’actif mais également le passif, c’est-à-dire les dettes transmissibles qu’avait le défunt à son décès.

A ce titre d’ailleurs, les dettes garanties par un droit de gage (mobilier ou immobilier) sont reprises par l’héritier auquel est attribué l’objet grevé.

Les héritiers doivent, en outre, s’acquitter de droits de succession selon leur degré de parenté avec le défunt et selon le lieu d’ouverture de la succession. Notamment, Neuchâtel est l’un des derniers cantons à percevoir des droits de succession auprès des enfants qui héritent de leurs parents et à hauteur de 3%.

 

Est-il intéressant d’anticiper le transfert de son bien immobilier ?

Oui et d’une façon générale je dirais qu’il est dans certaines situations nécessaire d’entamer des réflexions tôt pour maîtriser la transmission de sa succession. Il existe d’ailleurs des outils qui permettent une gestion intéressante de la temporalité.

On peut par exemple faire appel aux avancements d’hoirie. C’est ainsi que des parents peuvent léguer leur maison ou appartement, de leur vivant, à l’un de leurs descendants, et pour conserver une certaine égalité à l’égard de ses frères et sœurs, ce descendant se voit imputer la valeur du bien immobilier lors du partage successoral, sur sa part d’héritage.

Si les parents ne le souhaitent pas, ils doivent expressément dispenser le bénéficiaire du rapport. Attention toutefois, la disposition des parents ne doit pas toucher les réserves héréditaires des autres enfants, celles-ci leur revenant en tous les cas, sauf contrat conclu avec eux au travers d’un pacte successoral de renonciation.

Il est également possible de transmettre de son vivant sa propriété de logement à ses descendants, tout en continuant à y habiter, en recourant soit au droit d’habitation soit à l’usufruit. Dans les deux cas, la maison ou l’appartement devient la propriété des descendants et le précédent propriétaire parent conserve le droit d’y vivre sans contrepartie financière. Toutefois et dans le cadre d’un usufruit, il pourra également louer ce bien à un tiers et en percevoir les revenus.

Il s’agit dès lors de réfléchir à l’objectif poursuivi par ce démembrement de propriété, sans omettre l’hypothèse d’un emménagement au sein d’un EMS. Cette réflexion permettra également de déterminer si le transfert doit être effectué à titre onéreux, gratuit ou mixte, avec les conséquences fiscales afférentes à chacune de ces hypothèses.

 

Pour conclure, quel conseil auriez-vous à donner aux propriétaires qui s’interrogent sur la transmission de leur bien immobilier ?

Si certes le législateur a prévu quelle part devait revenir à quel héritier en l’absence de planification, les propriétaires disposent et encore plus depuis 2023 d’une grande liberté pour décider qui sont leurs héritiers et à quoi ils ont droit ; cette liberté constitue d’ailleurs l’un des premiers outils de planification, notamment dans le cadre d’une optimisation fiscale. Les propriétaires sont dès lors bien inspirés de se rapprocher de leur conseiller juridique afin que leurs souhaits soient mis en œuvre, dans toutes leurs perspectives et que leur patrimoine soit ainsi « bien » transmis.

Contacts

Adresse

Hélène Ecoutin-Dupuy

Faubourg du Lac 2
Case postale 2268
2001 Neuchâtel

Tel: +41 32 724 17 17

Email: info@etude-nvle.ch

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